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De l'Italie à Malte, les voix se font de plus en plus fortes contre une "Europe absente" pour aider les pays européens de la Méditerranée à faire face à l'afflux d'immigrés d'Afrique, accusation que Bruxelles récuse tout en admettant que les pays du Nord peuvent faire davantage.

Illustration Huffingtonpost 09062014 2Image fournie par la marine italienne le 10 avril 2014 du sauvetage la veille d'un bateau plein de réfugiés,
au large des côtes siciliennes le 30 octobre 2013 | AFP


Une vaste opération était en cours dimanche par des navires maltais, italiens et américains pour surveiller l'approche de 25 embarcations chargées de migrants partis des côtes libyennes.

En raison d'une météo favorable, des milliers d'immigrés et réfugiés - Syriens, Erythréens, habitants pauvres d'Afrique sub-saharienne - ont débarqué ces derniers jours ou s'apprêtent à débarquer, notamment dans les ports siciliens submergés.

Selon la marine italienne, l'un des bateaux devant accoster à Pozzallo transporte les corps de trois migrants décédés pendant la traversée dans des circonstances encore inconnues.

Le maire de ce port sicilien où sont arrivés plus de 500 immigrés en 24 heures, Luigi Ammatuna, a exprimé sur le site du journal La Stampa la peur que la situation devienne "ingérable", faisant état de premières annulations de réservations touristiques à l'approche de l'été.


400.000 à 600.000 migrants seraient prêts à partir de Libye

Des milliers de migrants ont trouvé la mort ces dernières années en tentant de traverser la Méditerranée dans des embarcations de fortune. C'est après deux naufrages dramatiques que Rome avait décidé à l'automne l'opération "Mare Nostrum".

Selon Malte, l'opération conjointe de ce dimanche est l'"une des plus importantes organisées ces dernières années". Elle associe bâtiments italiens et maltais, navires de guerre américains et cargos se trouvant dans la zone. Selon Rome, plus de 50.000 migrants ont débarqué depuis le début de l'année en Italie, autant que sur toute l'année passée. Ils ont été 2200 à arriver à Malte, selon La Valette.

Gil Arias Fernandez, directeur adjoint de Frontex, agence européenne chargée de la surveillance des frontières extérieures de l'UE, a reconnu récemment que, depuis la région de Tripoli, "le mouvement va se poursuivre car plusieurs centaines de milliers de migrants sont arrivés dans le pays et veulent le quitter en raison de l'insécurité". Selon le ministre de l'Intérieur italien, Angelino Alfano, 400.000 à 600.000 migrants seraient prêts à partir de Libye.

"L'insensibilité de l'Europe"

Le Premier ministre maltais, Joseph Muscat, dans un tweet, a fustigé l'Union européenne: "L'Europe est totalement absente", alors que les marines maltaise et italienne "accomplissent un travail optimal".

 En Sicile, le maire de Palerme, Leoluca Orlando, a pointé du doigt "l'insensibilité de l'Europe", tandis que celui de Catane, Enzo Bianco, a invité le gouvernement de Matteo Renzi à décréter "l'état d'urgence".

"La crédibilité des institutions européennes est vacillante, nous devons faire face à des chiffres insupportables", a déclaré Lillo Firetto, maire de Porto Empedocle.

L'Europe se défend

Interrogé par l'AFP, Michele Cercone, porte-parole de la commissaire européenne aux Affaires intérieures Cecilia Malmström, a garanti un "plein soutien de la Commission avec tous les moyens disponibles".

"L'Italie et Malte sont dans les principaux bénéficiaires des fonds UE pour la surveillance des frontières, et des mesures d'urgence ont été prises (30 millions d'euros extra pour l'Italie depuis octobre, qui ont aussi servi à financer Mare Nostrum)".

"Nous avons aussi prolongé deux missions Frontex de soutien de l'Italie. Nous sommes prêts à discuter d'ultérieures mesures de soutien", a souligné M. Cercone.

"Quant à la solidarité des autres Etats membres dans des domaines de compétence nationale, nous sommes d'accord que ceux qui ne sont pas confrontés à une forte pression migratoire et d'asile doivent et peuvent faire beaucoup plus", a admis M. Cercone.

En mai, après un naufrage près des côtes libyennes, Matteo Renzi avait déjà lancé de fortes accusations contre Bruxelles: "l'Europe nous laisse seuls. (..) Il n'est pas possible de sauver des Etats, des banques, puis de laisser mourir des mères avec leurs enfants", avait-il dit, faisant écho à des dénonciations du pape François sur "la mondialisation de l'indifférence".

Le ministre Alfano avait menacé de "laisser partir" d'Italie tous les demandeurs d'asile vers les autre pays membres, juste après avoir vérifié leur droit à une protection internationale, si l'UE n'augmentait pas de façon plus sensible les aides à l'Italie, y compris en "plaçant le drapeau européen sur l'opération Mare Nostrum".

 

Huffingtonpost, le 08 Juin 2014

 

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