Dans son rapport annuel, l’organisation constate que la crise a surtout touché les populations qui étaient déjà les plus marginalisées et appelle les dirigeants mondiaux à une meilleure coopération.

 

En 2020, la pandémie de Covid-19 a mis au jour « des décennies de politiques discriminatoires », lesquelles perpétuent « les inégalités, la discrimination et l’oppression ». C’est le bilan du rapport annuel de l’ONG Amnesty International publié mercredi 7 avril, qui détaille la situation des droits humains dans 149 pays à travers le monde.

Premier constat fait par l’organisation : « Les populations déjà marginalisées, notamment les minorités ethniques, les femmes et les personnes réfugiées et migrantes, ont été affectées par la pandémie de façon disproportionnée ». Certains pays, comme l’Ouganda, ont immédiatement fermé leurs frontières au début de la crise sanitaire, « ne faisant pas d’exception pour les personnes réfugiées ou demandeuses d’asile ».

Amnesty International s’alarme également de « la nette augmentation » du nombre de cas de violences domestiques ou liées au genre. « Pour de nombreuses femmes et personnes LGBTI, les obstacles à l’accès à une protection et à une aide se sont accrus », notamment à cause des restrictions du droit à circuler librement et des capacités réduites des services d’assistance.

 

« La pandémie a crûment mis en évidence l’incapacité du monde à coopérer efficacement »

Autre problématique mise en avant par la pandémie, selon l’ONG : l’érosion des services publics. « Le personnel de santé et les personnes ont subi de plein fouet les conséquences des politiques qui ont laissé péricliter les systèmes de santé et les mesures de protection sociale », pointe le rapport, dénonçant « des années de politiques d’austérité ».

L’organisation dresse également un sombre bilan des carences de certains dirigeants du monde : « Trop souvent, leur façon de gérer la pandémie a été marquée par l’opportunisme et [par] un mépris total pour les droits humains ». L’adoption de lois « réprimant pénalement les commentaires relatifs à la pandémie est devenue la norme », souligne Amnesty International, pointant notamment du doigt l’exemple de la Hongrie.

D’autres pays, tels que l’Arabie saoudite, le Koweït, le sultanat d’Oman ou Bahreïn, « ont utilisé la pandémie comme prétexte pour continuer de réprimer le droit à la liberté d’expression ». Certains dirigeants, comme le premier ministre indien, Narendra Modi« sont même allés jusqu’à (…) réprimer les propos critiques sans rapport avec le virus ».

Dans ce contexte sanitaire très compliqué, « la pandémie a crûment mis en évidence l’incapacité du monde à coopérer efficacement en période de grande difficulté à l’échelle planétaire », a déclaré Agnès Callamard, secrétaire générale de l’organisation.

« [L]es dirigeants de [certains] pays riches, comme l’ancien président américain Donald Trump, ont contourné les tentatives de coopération mondiale en achetant la plupart des stocks de vaccins disponibles dans le monde », critique l’ONG, ajoutant que ces mêmes « pays riches se sont en outre abstenus de pousser les entreprises pharmaceutiques à partager leurs connaissances et leurs technologies afin d’accroître l’offre de vaccins ».

 

Publié par le Monde, le 07/04/2021